Alors que l’inquiétude internationale grandit devant l’ampleur du massacre présumé commis fin mars à Moura, localité du centre du Mali, par l’armée et des paramilitaires identifiés comme appartenant au Groupe Wagner russe, plusieurs titres de la presse malienne rivalisaient, lundi 4 avril, d’éloges envers l’action des soldats. « Moura, victoire éclatante de l’armée », applaudissait en Une le quotidien L’Essor, regrettant seulement que ce « succès » soit « saboté » par « toute une faune de pseudo-spécialistes du Sahel et de prétendus défenseurs des droits de l’homme », qualifiés d’« alliés objectifs des groupes terroristes »« mettant en avant les pertes parmi les populations civiles » pour « ternir l’image de l’armée ». Le 1er avril, un communiqué de l’armée annonçant la mort de « 203 combattants des groupes armés terroristes » dans l’opération avait mis en garde contre toutes « spéculations diffamatoires à l’encontre des FAMA [Forces armées maliennes]».

Toutes les sources, locales et internationales, contactées par Le Monde accusent, au contraire, les FAMA et des combattants liés au groupe russe Wagner, qui a déployé au Mali depuis décembre près de mille hommes, selon des sources occidentales, d’avoir tué « sans distinction » lors du blocus imposé à Moura du 27 au 31 mars. La zone est contrôlée depuis des années par le Groupe de soutien de l’islam et des musulmans (GSIM), affilié à Al-Qaida, et le massacre aurait commencé dimanche, jour de marché, lorsque les djihadistes se mêlent aux populations civiles. Dans un rapport paru le 5 avril, l’ONG Human Rights Watch estime qu’« environ 300 hommes civils, dont certains soupçonnés d’être des combattants islamistes », ont été « sommairement exécutés » par les FAMA et leurs supplétifs « étrangers » lors de cet incident, qualifié par l’ONG de « pire atrocité » signalée depuis le début de la guerre déclenchée dans le nord du Mali en 2012.

« Pressions » de la junte

A Bamako, ni l’Association malienne des droits de l’homme (AMDH) ni Tabital Pulaaku, principale association de défense de la communauté peule, dont serait issue la majeure partie des victimes, n’ont pour l’heure officiellement condamné ce massacre. Depuis le coup d’Etat de mai 2021, venu conforter le pouvoir des militaires qui contrôlent le pays depuis leur premier putsch en août 2020, plusieurs défenseurs des droits de l’homme ont dit au Monde avoir subi des « pressions » de la junte visant à les faire taire. Tout comme certains responsables de la presse malienne….Lire la suite sur lemonde.fr