L’Etat ne peut pas gérer une situation sécuritaire aussi complexe comme la nôtre en faisant du bricolage et en recourant aux tactiques infructueuses d’un passé récent. Aujourd’hui, le Mali n’a d’autre choix que de se mettre aux trousses des terroristes, en prévenant au lieu de subir ou de répliquer.
Il aura fallu la multiplication des attaques terroristes au centre et au sud du pays pour que se tienne un conseil de défense à Koulouba. Le conseil a réuni dimanche dernier autour du président de la République et du chef du gouvernement les ministres de la Défense, de la Sécurité, le porte-parole du gouvernement et différents responsables des Forces armées et de sécurité.
Si rien n’a filtré de la rencontre en question, le procédé rappelle bien celui auquel on était habitué sous le régime défunt d’ATT. Ce dernier, avec des généraux aux postes clés, attendait l’éclosion des crises, notamment sécuritaires pour annoncer des réunions dites salvatrices mais dont on ne voyait point les retombées sur le terrain. Le pouvoir actuel n’apporte donc rien de nouveau à ce niveau et ne parvient pas à tenir la dragée haute aux terroristes.
Le tout revient à dire que sans feuille de route applicable et reflétant la réalité sur les théâtres de violence, les terroristes continueront d’avoir droit de vie sur la cité. L’Etat ne peut pas gérer une situation sécuritaire aussi complexe comme la nôtre en faisant du bricolage et en recourant aux tactiques infructueuses d’un passé récent.
La résurgence des jihadistes requiert des solutions novatrices. Face à des ennemis mobiles et aux méthodes aussi imprévisibles que fatales, l’Etat ne peut plus continuer à être timide, voire absent sur divers fronts. Cette absence est perceptible au niveau de la traque des semeurs de la terreur. Ceux-ci se déplacent avec tout leur arsenal de guerre sans être inquiétés.
Un terroriste ne peut pas commettre une attaque dans une localité sans en avoir traversé au moins une autre. La porosité des frontières et le manque de coopération sécuritaire entre pays voisins, comme l’a insinué le ministre de la Défense et des Anciens combattants, Tiéman Hubert Coulibaly, en début de semaine, ne doivent plus servir de faux-fuyants.
Zones d’ombre
Après l’attaque de Nara samedi dernier qui a coûté la vie à trois soldats maliens, des autochtones de la ville ont soutenu que des « islamistes »armés jusqu’aux dents avaient fait irruption dans leur cité afin de dicter leur loi. D’où étaient venus ces individus armés ? Pourquoi n’avaient-ils pas été appréhendés par les forces de défense et de sécurité des zones avoisinantes ? Et les services de renseignement maliens ?
Autant d’interrogations dont les réponses permettront à l’Etat de gérer efficacement les menaces terroristes et de démanteler éventuellement les cellules jihadistes sur notre territoire. Le Mali n’a d’autre choix que d’aller aux trousses des terroristes, en prévenant au lieu de subir ou répliquer.
La participation des forces étrangères au Mali pourrait aider à bouter le terrorisme hors du pays. Mais, il y a beaucoup de calculs, d’incompréhensions et de tabous autour de la collaboration entre le Mali et certains partenaires internationaux au moment où tout le monde doit s’activer autour d’objectifs communs. Une dégénération de la situation sécuritaire au Mali aurait des conséquences non seulement sur tous ceux qui opèrent dans notre pays, mais aussi sur le reste du monde.
Il doit y avoir plus d’intensité et de sincérité dans la coopération sécuritaire. Quand le représentant spécial adjoint du secrétaire général de l’ONU au Mali, Arnauld Akodjenou, déclare que « le mandat de la Minusma ne lui permet pas de lutter contre les groupes jihadistes et terroristes », il relance le débat sur l’utilité de son institution sous nos cieux.
Bien qu’étant une mission de stabilisation, la Minusma ne peut pas s’acquitter de ses tâches sans des actions d’envergure. C’est pourquoi, beaucoup d’observateurs croient que le Conseil de sécurité aurait mieux fait de revoir le mandat de la Minusma avant de le renouveler. Ce qui aurait permis de la doter de moyens humains et matériels plus conséquents.
A l’opposé de la Minusma, Barkhane dispose de moyens suffisants, mais le mystère et des doutes subsistent sur les interventions de cette opération. Il y a beaucoup d’énigmes dans les relations entre la France et les séparatistes du Nord, dont beaucoup sont reconnus comme des complices des terroristes et de leurs réseaux mafieux.
Le Mali ne sera pas à l’abri d’attaques terroristes si les sécessionnistes du Nord accèdent à des postes de responsabilité. Or, les « arrangements »sécuritaires signés à Alger prévoient l’entrée des rebelles dans le gouvernement. A peine signé, l’accord de paix redonne déjà le sourire et des ambitions aux récalcitrants, qui pourraient s’en servir pour transformer notre pays en un nid de terroristes.
Le secrétaire général du Mouvement arabe de l’Azawad (MAA), membre de la Coordination des mouvements armés (CMA), s’est empressé de déclarer l’attachement de son mouvement à la promotion de ses cadres.
« Nous voulons des portefeuilles-clés comme ceux de la Sécurité intérieure, de la Défense, ou encore des Finances et des Affaires étrangères. Nous attendons aussi l’ouverture de postes au sein des services nationaux et régionaux ou encore des représentations diplomatiques à l’étranger », a insisté Sidi Ould Brahim Sidati.
S’il n’y a donc plus de doute sur les objectifs des leaders de la CMA, l’Etat doit éviter d’ouvrir un boulevard vers une catastrophe certaine en promouvant les rebelles à des postes stratégiques. Le cas du leader d’Ançar Eddine, Iyad Ag Ghali, est plus que pertinent. Nommé conseiller consulaire à Djeddah en 2007 grâce aux accords d’Alger, conclus le 4 juillet 2006, cette figure de la rébellion se sert de son poste pour affûter ses armes, avec notamment des contacts permanents avec Al-Qaïda.
La suite est connue : les autorités saoudiennes l’expulsent pour« collaboration avec les terroristes », mais le natif de Boghassa reprend ses activités terroristes dans son Kidal natal. Le régime IBK est donc averti, car la lutte contre le terrorisme passera également par des nominations judicieuses.
PAR MLSIDIBE