Les évènements qui ont marqué la trêve qu’ont connue les pourparlers inter-maliens d’Alger n’augurent pas une reprise sans embuche. Il était prévu que les négociations seront corsées. La phase préliminaire, qui a abouti à l’adoption d’une feuille de route consensuelle, s’achevait déjà sur des tensions. Durant tout ce premier round les deux ensembles de mouvements armés, constituant la partie interlocutrice du gouvernement, n’ont pas voulu s’asseoir sur la même table.
La coalition des mouvements MNLA-HCUA-MAA a catégoriquement refusé de reconnaitre leurs compatriotes des mouvements CPA-CM-FPR-MAA comme des partenaires partageant les mêmes objectifs. Ils sont accusés de ne pas être assez radicaux, et même d’être à la solde du gouvernement malien. Ce qui n’est pas totalement faux.
Pendant cette trêve, mouvements armés et gouvernement ont procédé à une restitution des discussions d’Alger et à la vulgarisation de la feuille de route auprès des bases. Il est ressorti de cet exercice que, contrairement au gouvernement qui a reçu un accueil favorable pour avoir arrangé une feuille de route ne prévoyant aucun point de discussion sur la laïcité et l’unité de l’Etat, les groupes armés radicaux ont, eux, été confrontés à une hostilité de leurs militants de base.
Les leaders rebelles sont accusés d’avoir échoué avant même de commencer. Le HCUA, un mouvement proche des islamistes d’Ançar Dine, n’a pas réussi à insérer dans l’agenda des négociations des discussions sur le statut religieux du nord du Mali. Concernant le MNLA, le seul mouvement véritablement séparatiste, il ne lui a été concédé ni des discussions sur l’autonomie, encore moins sur l’indépendance. Ceci ne tient toutefois que dans les mots formulés.
La frustration est donc perceptible au sein de ces mouvements qui ont enregistré des dissensions pendant cette trêve.
Le pouvoir malien pourra se réjouir d’avoir contribué à fissurer le bloc compact, mais qui demeurait fragile, des groupes armés indépendantistes. Grâce aux manœuvres des mouvements qui défendent le Mali, réputés proches du gouvernement, les groupes armés radicaux ne tiennent vraisemblablement plus. En plus des débâcles militaires qui se multiplient face à la résistance farouche des pros unité, l’alliance créée à la veille des pourparlers semble commencer à s’effriter.
En effet, le MAA, la branche alliée au MNLA, connait une dissidence. Trois leaders de ce mouvement ont décidé de rompre avec celui-ci pour créer le Mouvement Populaire pour la Sauvegarde de l’Azawad (MPSA), un nouveau groupe armé non séparatiste.
Parallèlement à cette dissidence, le GATIA (Groupe d’autodéfense touareg Imghad et alliés), un tout nouveau groupe armé défendant l’intégrité territoriale du Mali, a vu le jour « pour, selon son secrétaire général, que les autres frères qui sont en armes ne nous dictent pas ce que l’on doit faire et ce que l’on ne doit pas faire. »
Comme pour maintenir l’équilibre, un autre mouvement dénommé Groupe armé populaire contre l’autorité malienne (GAP CAMA) a également vu le jour durant cette trêve.
Ces groupes s’ajoutent à la dissidence du CM-FPR et réclament tous leur participation aux négociations devant normalement débuter le 1er septembre. Des pourparlers auxquels prennent part pas moins de six mouvements politico-militaires aux intérêts aussi divers que divergents.
Dans un tel contexte, la reprise des pourparlers s’avère nettement compromise. Quand même l’Algérie réussit un coup de maître le chemin menant à la paix au nord du Mali semble plus miné que jamais. Avec la multiplicité des groupuscules armés, un échec de la médiation algérienne pourrait engendrer des conséquences désastreuses pour l’avenir du Mali.