Il y a une semaine, deux villages situés dans la commune rurale de Nouga, cercle de Kangaba, ont été endeuillés par la mort de plus d’une dizaine de jeunes, de femmes, des enfants et plusieurs blessés à la suite d’un affrontement sanglant. A l’origine du différend, un litige autour d’un site minier dont les deux villages réclament la paternité. Malgré le drame, aucune réaction des plus hautes autorités pour apaiser le climat entres les deux villages, mais aussi pour rétablir la justice, pour que vivent en sérénité les habitants de cette zone qui sont confrontés à cette guerre meurtrière depuis 2015. Les habitants de ladite commune rurale crient ainsi à la non-assistance à personnes en danger.
Selon le Président du Conseil de cercle, ce problème est un vieux litige entre les deux villages mais qui n’a jamais été traité efficacement par les autorités judiciaires du cercle. Ce qui fait qu’aujourd’hui les populations sont tentées de se faire justice elles-mêmes. Toujours selon lui, il y’a plusieurs problèmes qui sont pendants au tribunal et qui ne sont jamais traités convenablement.
De sources locales, ces villages s’affrontent constamment. « Les affrontements du mardi 10 janvier 2022 ont été certes plus meurtriers, mais les tensions sont les quotidiens de ces Maliens depuis des années. Ainsi, les habitants vivent dans la peur puisqu’ils peuvent être tués pour des balles réelles des protagonistes qui sont constamment armés de la tête aux pieds, bien que le port illégal des armes soit proscrit au Mali », a dénoncé notre interlocuteur.
« Au lever du jour du mardi 10 janvier, vers 4h du matin, il y a eu un coup de feu dans le placeur qui a mortellement touché un ressortissant de Tombola. C’est ce drame qui a finalement bloqué la tentative de gestion à l’amiable car la population de Tombola a tout simplement considéré que les messagers de Danga étaient responsables du tir mortel. C’est ainsi qu’au moment de l’enterrement du jeune décédé du village de Tombola, un autre jeune de Danga, qui n’était pas informé de la situation, de retour d’un déplacement qui l’avait conduit dans le village de Kokoyo, a été intercepté, abattu et jeté dans les caniveaux par la jeunesse de Tombola », rapporte le rapport d’une mission de l’association culturelle ‘’Le forum du Mandé’, avec à sa tête le Dr Kô KEITA.
Ce rapport confirme ainsi les témoignages des habitants de la localité, selon lesquels les tueries continuent même après les affrontements, sous les yeux indifférents des autorités judiciaires et administratives qui peinent à jouer pleinement et convenablement leur rôle afin que les coupables puissent subir la rigueur de la loi.
Selon le même rapport, depuis les affrontements du 10 janvier, jusqu’à l’arrivée de ladite mission, il n’y a eu aucune arrestation de la part des autorités, bien que plusieurs auteurs de la tuerie de ce jeune et du massacre du 10 janvier soient bien identifiés.
Une situation qui pousse à la vengeance selon les habitants des deux villages. La mission indique aussi que les intervenants ont tous dénoncé la corruption de l’Administration, de la justice et de la gendarmerie dans le cercle, qui fait qu’aujourd’hui les populations se rendent justice elles-mêmes.
A part cette association qui a effectué une mission dite de médiation entre les deux villages antagonistes, aucune structure de l’Etat n’a encore pipé mot. Bien que médiatisé, le massacre n’a fait l’objet d’aucun communiqué officiel du gouvernement.
Cette indifférence des autorités corrobore parfaitement les indignations des populations qui estiment être laissées à leur triste sort et ne savent plus à quel saint se vouer. Loin d’être sous le joug des terroristes, la commune rurale Nouga est devenue une zone très dangereuse au su et au vu des autorités compétentes sur place, qui restent jusque-là de marbre.
La preuve, cette journée meurtrière dans la commune de Nouga était connue d’avance par les autorités sécuritaires et administratives. Selon un Directeur d’école, le Directeur du centre d’animation pédagogique (CAP) de Kangaba avait instruit aux différents directeurs d’école des villages riverains du site de fermer les classes jusqu’à nouvel ordre, à quelques minutes seulement des affrontements.
En tout état de cause, les autorités de la transition doivent porter un œil attentif à ces tueries communautaires qui deviennent une plaie béante. Il ne faudrait surtout pas que ces conflits viennent s’ajouter à la crise sécuritaire à laquelle le Mali fait face depuis plus d’une décennie.
PAR CHRISTELLE KONE
Source : Info Matin